Pour la dernière séance, Nora semble émue. Elle souhaite récupérer quelques-unes de ses œuvres. Je lui propose de fabriquer une pochette. Nora met des tissus à l’intérieur de cette pochette et quand elle les sort, elle me dit qu’ils sont plus grands : « C’est une pochette magique qui transforme en grand ».
Elle met sa main à l’intérieur et me dit en la ressortant « hop, elle a grandi », puis fait de même avec son nez, son genoux et plusieurs parties de son corps. A chaque fois, la magie opère, elle se transforme en « grande ». Elle monte sur la table et me dit : « tu as vu comme je suis grande maintenant ».
J’apprendrai par une éducatrice, après la séance, que c’était pour Nora son dernier jour dans ce service qui, au vue de ses progrès, n’est plus adapté à ses besoins. Elle aurait pu quitter l’IME depuis quelques semaines mais il a semblé important aux équipes qu’elle puisse bénéficier des ateliers d’art-thérapie jusqu’à la fin de la prise en charge.
Je me réjouis d’autant plus de cette dernière séance. Nora a grandi et semble prête à rejoindre un autre groupe.
Les effets positifs de l'art-thérapie
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Face à l’agressivité et à la destructivité, qui se sont exprimées lors des premières séances, le fait de pouvoir résister, de conserver, voire parfois de réparer ces objets, a construit une base dans la relation. Cette étape s’est avérée essentielle pour ancrer l’existence à quelque chose dans le réel, en tout cas dans le premier temps de la rencontre. Le soin à leur conservation ou la réparation confèrent à ces objets créés pendant les séances d’art-thérapie, et par-delà à Nora, le sentiment de son existence et de son importance.
La 6ème séance a été un moment capital, un moment de « bascule » pour Nora. En acceptant de faire de cette trace une marque identifiée, une production subjective, les éducateurs et moi-même avons reconnu l’avènement d’un sujet sorti du chaos de l’indifférenciation et l’apparition d’un objet transitionnel.